Des nouvelles de la droite tourangelle, en léger différé de la commission d’investiture départementale LR

Samedi dernier, en toute discrétion, avait lieu la commission départementale d’investiture des Républicains de Touraine, lors de laquelle quelques notables locaux désignés un peu à la manière de grands électeurs ont évalué les candidats du parti qui entendent briguer la députation en juin prochain. A la fin de cette subtile cuisine, des noms sont proposés à la commission nationale d’investiture qui est la seule souveraine pour désigner ceux qui porteront les couleurs LR aux législatives.

Cette sympathique réunion avait donc lieu à la mairie de Saint-Cyr, fief de Philippe Briand, grand baron local, première fortune du département et protagoniste malheureux d’un des scandales politico-financiers liés à Nicolas Sarkozy, ce qui lui a valu une condamnation retentissante… mais qu’importe ce petit accident de parcours ou alors son absentéisme proverbial à la Métropole, Briand entent rester au centre de la partie, même si certains se sentent pousser des ailes avec l’affaiblissement de cette figure incontournable issue de la chiraquie.

Des sources qui ont participé à la journée n’ont pas résisté à l’envie de me faire un compte-rendu, témoins de la joyeuse complicité qui opère dans cette famille après avoir traversé la crise de succession de Nicolas Sarkozy au national en 2012 puis celle de Serge Babary au local en 2017, participant à cette ambiance assez fraîche qui règne entre les trois clans à l’œuvre en Touraine et qui structurent le parti bien plus que la question des primaires d’il y a quelques semaines. Visiblement d’accord sur un pacte de non-agression, chacun évitant soigneusement de prendre parti ouvertement pour Bertrand, Pecresse, Barnier ou Ciotti de peur de choisir le mauvais cheval, tous les poids-lourds se sont rangés avec discipline derrière Valérie Pécresse. Mais lors de cette journée d’investitures, ce qui s’est joué, c’est surtout la suite de l’affrontement de fond entre d’une part le clan Briand avec son lieutenant Augis et le clan Paumier – le président du CD37 -, davantage macron-compatible. « Cette rivalité remonte aux temps d’André-George Voisin et de Jean Royer, personne ne sait plus vraiment pourquoi mais tout tourne autour de ça. Dès que vous rentrez dans le parti, même tout jeune, vous êtes obligés de vous affilier à un des deux clans, ça n’a aucun sens, c’est vraiment de l’ego et de l’ambition » témoigne un militant LR.

Dans la première circonscription, celle de Tours, c’est Olivier Lebreton qui a été désigné, arrivé juste devant Marion Nicolay-Cabanne et Jérôme Tébaldi. M. Lebreton, proche de Paumier, s’illustre régulièrement pour des interventions outrancières en conseil municipal à Tours – lorsqu’il les écrit et ne les plagie pas tout simplement -. Il est également conseiller métropolitain, conseiller départemental, vice-président au Département en charge des Finances, vice-président du service départemental d’incendie et de secours. Bien entendu, il a été parmi les plus grands pourfendeurs du cumul des mandats… En tout cas, Mme Nicolay-Cabanne, ancienne première adjointe à Tours et figure du clan Bouchet, réputée proche de Valérie Pécresse, n’a pas été retenue, certains interprétant cela comme une punition pour sa proximité avec Bouchet qui a le mauvais goût de ne pas être LR. Enfin, et malgré le fait que Jérôme Tébaldi ait été largement choisi par les militants LR l’an passé comme délégué de cette circonscription, il finit loin derrière. Une bien belle leçon de démocratie et de cohérence que nous livrent là nos amis LR. Valérie Pécresse qui suivait la journée en visio depuis la rue Vaugirard aura sans doute apprécié.

Dans la deuxième circonscription, celle d’Amboise et de Chateau-Renault, c’est Angélique Delahaye qui est désignée, elle qui est issue du syndicalisme d’exploitants agricoles, ex-maire, ex-conseillère régionale et ex-députée européenne, dont les collaborateurs parlementaires étaient à l’époque…Marion Nicolay-Cabanne et Fabrice Boisgard, président des LR37. Delahaye est plutôt proche de l’aile dure du parti et de Laurent Wauquiez dont la dérive droitière est assez symptomatique des évolutions de l’ère post-Sarkozy. Face à elle, il y avait une proche de Frédéric Augis et que certains de ses petits camarades considèrent comme une parachutée. En effet, Svetlana Nicolaeff figurait déjà sur la liste LR défaite aux dernières régionales et elle est l’épouse du secrétaire départemental LR Matthieu Lemarié, connu pour ses engagements au sujet de… la pêche. A noter que dans cette circonscription, le député sortant est Daniel Labaronne, un ancien PRG passé à LREM, très proche de Jean-Gérard Paumier qui soigne son réseau d’élus, notamment avec Mme Brigitte Dupuis, maire LR de Chateau-Renault dont la majorité défraye la chronique depuis des mois avec une pratique disons très singulière du pouvoir et un entourage qui interroge, notamment son adjoint à la sécurité, le LR Philippe Péano, visiblement, très proche des idées de Zemmour.

Dans la troisième circonscription, celle de Loches, c’est Sophie Métadier qui a été reconduite, elle qui est l’actuelle députée UDI du coin après le départ de Sophie Auconie pour raisons de santé il y a quelques mois. Pour l’heure, elle reste très discrète dans son activité parlementaire, mais tous les espoirs sont permis.

Sans la quatrième circonscription, celle de Chinon-Joué-Ballan, tenue par la cultissime LREM Fabienne Colboc, la bataille a été rude. Le président LR37 Fabrice Boisgard, adjoint à Saint-Cyr et donné en disgrâce du clan Briand a fait des pieds et des mains avec Hervé Novelli pour soutenir la candidature de Sophie Lagrée, adjointe à Chinon et issue de la « droite office de tourisme » plutôt proche de Paumier-l’ami-de-la-ruralité. En face, on retrouvait le cumulard Judicaël Osmond, adjoint de Frédéric Augis à Joué, conseiller métropolitain, conseiller départemental et vice-président en charge des collèges au CD37, le tout avec un petit boulot de complément chez Cytia, propriété de Philippe Briand. Finalement, c’est Sophie Lagrée qui a été largement désignée, visiblement à la surprise générale.

Enfin, dans la cinquième circonscription, celle de Langeais, Luynes et St Cyr, c’est le président de LR37 himself qui est investi, Fabrice Boisgard.

Bref, un superbe exemple de fonctionnement de l’ancien monde, avec des vieilles gloires qui s’accrochent au pouvoir ; un Jean-Gérard Paumier en plein triomphe de ses réseaux mais qui a pris de sacrés risques pour les élections départementales à Saint Pierre, ce dont tout le micro-cosme politique et journalistique est au courant et qui doit désormais ménager tous les notables à qui il a fait des promesses ; un Philippe Briand en fin de règne, avec un Augis qui se voyait en haut de l’affiche avec sa drôle de majorité faite de bric et de broc à la Métropole et dont les chroniques judiciaires de ces derniers mois lui valent nombre de critiques. A moins d’un miracle de Pécresse aux présidentielles, il semble que, comme en 2017, les Républicains aient déjà réuni tous les ingrédients d’une belle déculottée, sous le regard attentif du clan Bouchet qui a les municipales de 2026 en ligne de mire et de la jeune garde du parti, de plus en plus tentée de rejoindre Edouard Philippe et qui ne se reconnaît plus dans cet énième virage droitier. Dieu merci, l’accumulation de candidatures de la gauche la plus bête du monde pourrait les sauver, du moins du ridicule.